Livre des sources médiévales:
BULLE PAPALE POUR L'UNIVERSITE DE PARIS (1231)
Cette bulle, émanant de la chancellerie du pape Grégoire IX
(1227-1241) et s'intitulant "Parens scientiarum universitas" est datée
du 13 avril 1231. Elle fait suite aux lettres du légat Robert de
Courçon (de l'année 1215), donnant ainsi les principaux
privilèges qui consacrèrent l'indépendance juridictionnelle
et intellectuelle de l'Université de Paris. Le terme "universitas"
désignait, à l'époque, "tout groupe d'hommes ayant
un lien organique ou une commune appartenance"... Dans la moitié
Nord de l'Europe (Paris, Oxford), les universités étaient avant
tout des associations de maitres ou encore des fédérations
d'école. Les disciplines dominantes étaient les arts libéraux
et la théologie.
Grégoire Evêque, serviteur des serviteur de Dieu, à ses
chers fils, tous les maîtres et étudiants de Paris, salut et
bénédiction apostolique. Paris, mère des sciences, comme
une autre Cariath Sepher, cité des lettres, brille d'un éclat
précieux, grande sans doute, elle fait attendre d'elle de plus grandes
choses, grâce à ceux qui apprennent et à ceux qui enseignent
(...) Aussi n'est-il pas douteux que celui qui, dans la cité susdite,
se sera de quelque manière efforcé de troubler une grâce
aussi éclatante ou celui qui ne sera pas opposé clairement
et avec force à ceux qui la troublent, ne déplaise
profondément à Dieu et aux hommes. C'est pourquoi, ayant
considéré attentivement les problèmes qu'on nous a soumis
à propos de discorde qui est née ici à l'instigation
du diable et qui trouble gravement les études, nous avons, assisté
du conseil de nos frères, pensé qu'il était
préférable de les résoudre par un règlement sage
plutôt que par une décision judiciaire.
Ainsi, en ce qui concerne le statut des étudiants et des écoles,
avons-nous décidé que l'on devra appliquer les règles
suivantes: Celui qui sera choisi comme chancelier de Paris devra, lors de
son institution, jurer devant l'évêque, ou à son mandement,
dans le chapitre de Paris, en présence de deux maîtres
convoqués pour cela et représentant de l'Université
des étudiants, que pour le groupement de la théologie et des
décrets, loyalement et selon sa conscience, il n'accordera la license
d'enseigner qu'à des hommes dignes en fonction du lieu et du moment,
selon le statut de la cité, l'honneur et le renom des facultés,
et la refusera aux indignes, toute considération de personne ou d'ogine
étant écarté. Avant d'accorder une license à
qui que ce soit, dans les trois mois à partir de la demande de licence,
il devra faire examiner avec diligence tant par tous les maîtres en
théologie présents dans la cité que par d'autres personnes
honnêtes et cultivées, par lesquelles on peut connaitre la valeur,
et ses ambitions et autres choses que l'on examine dans ces circonstances:
ayant ainsi examiné ce qu'il convient de faire et ce qu'il parait
opportun, en sous âme et conscience il donnera ou refusera au candidat
la licence demandée.
Quant aux maitres en théologie et en décret, lorsqu'ils
commenceront à donner des leçons, ils prêteront serment
en public de porter fidèlement témoignage sur les choses susdites.
Le chancelier jurera aussi de ne révéler en aucun cas le propos
des maîtres à leurs détriments,la liberté et le
droit des chanoines de Paris demeurant dans leur vigueur initiale. Pour les
médecins, les artistes, et les autres, le chancelier promettra d'examiner
loyalement les maîtres et d'admettre les gens dignes à l'exclusion
des indignes. Au reste, il est vrai que le mal se glisse facilement là
ou règne le désordre, nous vous accordons le pouvoir
d'établir de sages constitutions ou règlements sur les
méthodes et horaires des leçons, des discussions, sur la tenue
souhaitée, sur les cérémonies funéraires, sur
les bacheliers: qui doit leur donner des leçons, à quelle heure
et quel auteur choisir; sur la taxation des loyers et l'interdiction de certaines
maisons; et le pouvoir de châtier comme il faut ceux qui se rebelleront
conte ces constitutions ou règlements en les excluant (...).
Celui qui aura commis un crime nécéssitant l'emprisonnement
sera détenu dans la prison de l'évêque, interdiction
absolue étant faite au chancelier d'avoir une prison particulière.
Nous interdisons en outre qu'un étudiant soit arrêté
pour une dette, alors que cela est interdit par des décisions canoniques
régulières. Ni l'évêque, ni son official ni le
chancelier ne devront prononcer de peine pécuniaire pour relever d'une
excommunication ou de quelque autre censure. Le chancelier ne devra exiger
des maîtres auxquels il accorde la licence aucun serment, aucune marque
de soumission ou autre caution et ne réclamera pour cet accord aucune
somme d'argent ou obligation mais se contentera du serment indiqué
plus haut. Nous interdisons formellement que les étudiants se
déplacent en armes et que l'Université défende ceux
qui troublent la paix et l'étude. ceux qui feignent d'être
étudiants sans fréquenter les écoles ni avoir de maitres
ne devront pas jouir des franchises (libertas) des étudiants (...).
Que personne n'enfreigne cette décision, constitution, concession,
défense et interdiction ou n'ose s'opposer à elle par une audace
téméraire. Et si quelqu'un ose y attenter, qu'il sache qu'il
encourera l'indignation de Dieu tout puissant et des bienheureux Pierre et
Paul Apôtres. Donné au Latran, au Ides d'avril, en la
cinquième année de notre pontificat.
Source: "Chartularium Universitatis Parisiensis", éditions H. Denifle
et E. Chatelain, Paris, Delalain, 1889, Tome 1, p. 136-139.
Auteur: Kareen Healey kareenh@dsuper.net
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