Le Tiers Etat de la Sénéchaussée de Nismes assemblée
par ordre du Roi pour porter dans l'assemblée des Etats
Généraux convoquée par Sa Majesté, les respectueuses
représentations d'un peuple soumis et fidèle, et l'expression
de ses voeux, s'empresse de répondre aux vues paternelles du meilleur
des Rois, et de lui apporter les souhaits de ses peuples pour tout ce qui
peut établir un ordre constant et invariable dans toutes les parties
du Gouvernement. Et puisque le plus grand bienfait qui puisse émaner
de la bonté d'un monarque est d'appeller ses sujets autour de son
thrône, de les consulter eux-même sur tout ce qui peut faire
leur Bonheur, et de leur tendre une main généreuse pour les
rappeller à leur ancienne liberté et préparer ainsi
la régénération de l'Etat, le premier devoir des peuples
attendris est de porter aux pieds du Souverain les témoignages respectueux
de leur immortelle reconnaissance. Consolés déjà des
maux dont leur patrie est affectée par la certitude que tant de soins
en procureront la guérison, ils mettent leur plus grande sollicitude
à rendre au Prince qu'ils chérissent le calme et la
tranquilité dont il est privé depuis si longtems, et si, pour
concourir avec lui à la restauration de la France, ils sont forcés
de lui offrir le spectacle des plaies douleureuses qui l'affligent, ils trouvent
dans leur obéissance envers leur Roi, dans leur tendresse pour leur
Père et dans l'amour qu'il porte lui-même à ses sujets,
de puissants motifs pour rompre le silence et pour s'acquitter du devoir
indispensable qu'il leur à lui-même prescrit.
C'est donc pour remplir cet engagemens sacrés qui lient le bonheur
du Monarque à la prospérité des sujets, que le Tiers-Etat
de la sénéchaussée de Nismes représente très
humblement à Sa Majesté que les abus de tout genre qui se sont
introduits successivement dans l'Etat, ne peuvent être réformés
que par une recherche attentive dans toutes les parties de l'administration,
et que la France ne peut être régénérée
et renaître en quelque manière à une nouvelle vie, qu'en
la reconstituant sur ces principes, aussi anciens que le monde, qui sont
gravés dans tous les coeurs, dont la nature est d'exister toujours,
quoique souvent oubliés, et contre lesquels le tems, les abus, les
usages et nulle sorte d'institution ne sçauroient prescrire.
Le Tiers-Etat de la sénéchaussée de Nismes, en confiant
à ses députés les intérêts des peuples
les exorte à porter constamment, dans leurs coeurs, les sentimens
d'admiration et d'amour pour leur Roi, dont toute la nation est
pénétrée, à concourir avec ce prince chéri,
dans la recherche des moyens qui peuvent opérer la félicité
des peuples, et à se rendre dignes aussi de la confiance de leurs
concitoyens de l'estime de la France et du noble caractère de conseil
et d'ami dont le meilleur des Rois les honnore.
Le Tiers-Etat de la sénéchaussée charge ses
députés de se regarder en même tems, comme les
députés de tous les français, de considérer en
grand les maux de la France et leurs remèdes, et de porter aux pieds
de Sa Majesté, et sous les yeux de la nation assemblée, les
doléances, réclamations et représentations suivantes:
Chapitre Ier: De la
Constitution
I. Le Bonheur ou le malheur des peuples étant
une suite nécessaire des bonnes ou des mauvaises loix, d'une bonne
ou d'une mauvaise constitution, les députés prendront pour
base ce principe, et concourront avec Sa Majesté à la recherche
des moyens de procurer à la France de bonnes loix, en sorte que tous
les sujets du Roi en ressentent pour toujours les effets salutaires
II. L'objet des loix étant de conserver à
tous les citoyens, sous la protection et par la vigilance du Monarque, les
biens qu'ils apportent en commun dans la société, les
députés ne perdront jamais de vue que les loix doivent tendre
à conserver aux hommes la liberté d'agir, de parler, de penser,
la propriété de leurs personnes, de leurs biens, de leur honneur
et de leur vie, le repos enfin de la sureté, et que le comble de la
perfection dans les loix est de procurer à ceux qui y sont soumis
sa plus grande somme de bonheur possible.
III. Cependant, les bonnes loix à faire pour
tous, ne pouvant être bien éclaircies que par les lumières
de tous, Sa Majesté sera supliée de continuer à son
peuple le bienfait qu'elle vient de lui promettre de s'entourer de ses sujets,
et que pour cet effet, les loix seront désormais librement consenties
par la Nation dans les Etats Généraux; qu'en conséquence,
la nation sera périodiquement assemblée, en la personne de
ses représentans, à des époques fixes et raprochées.
IV. Que les loix provisioires, locales et
momentanées, que Sa Majesté jugera de sa sagesse de publier
dans l'intervalle d'une assemblée nationale à l'autre, soyent
pareillement adressées aux Etats provinciaux et administrations
provinciales, et aux tribunaux d'adjudicature, en accordant aux uns et aux
autres la faculté de faire à Sa Majesté, telles
représentations qu'ils jugeront convenables pour le bien public, sur
le contenu de ces sortes de loix, sans néantmoins que jusqu'à
la prochaine assemblée nationale, ces représentations puissent,
en aucun cas, en retarder la publication ou l'exécution.
V. Que dans la prochaine assemblée des Etats
Généraux, on commencera à délibérer par
têtes et non par ordres, précaution sans laquelle les abus ne
pouroient être réformés, ni les peuples soulagés,
ce qui rendroit cette assemblée absolument illusoire.
VI. Qu'il seroit également illusoire de s'occuper
de remédier aux abus, si l'on ne remontoit à leur source, et
si l'on ne s'attachoit à prévenir que la Nation ny fut de nouveau
exposée; qu'en conséquence, la constitution et les loix seront
le premier objet dont s'occupera l'assemblée nationale, afin que,
ces principes étant posés, l'extirpation successive des abus
en soit la conséquence naturelle, et que Sa Majesté, qui veillera
à leur exécution, jouisse de la gloire d'avoir
régénéré son peuple, et du bonheur digne de son
coeur royal d'avoir opéré la félicité de ses
sujets.
Chapitre II: Des Etats Généraux
et Provinciaux
I. Les députés représenteront
très humblement à Sa Majesté que les précédens
Etats Généraux de la France, ne présentant dans la nuit
des tems et les ténèbres de l'histoire, qu'une destitution
absolue de principes, il ne seroit digne ni des vues de la sagesse souveraine
de Sa Majesté, ni des lumières et de la dignité du peuple
français, de se livrer à la discussion des formes
incohérentes qui composèrent tour à tour ces
assemblées; qu'il est donc indispensable de consulter, pour la formation,
la composition et l'organisation des Etats Généraux, les droits
des hommes, les intérêts des individus et le bonheur de tous,
de manière que la représentation des sujets soit libre,
élective, uniforme et intégrale pour tous les citoyens, pour
toutes les contrées du roiaume, et pour tous les pais soumis à
la domination du Roi.
II. Les députés représenteront
encore à Sa Majesté que le Tiers-Etat composant la nation
entière, puisque les deux premiers ordres en sont à peine la
centième partie, il doit obtenir de la justice du Roi, de
l'équité publique et de la nature même des choses, un
nombre de représentans plus proportionné au nombre des individus
de cet ordre, à la somme de ses contributions, à l'importance
des services qu'il rend à la Nation, c'est-à-dire qu'il se
rend à lui-même, et à l'influence nécessaire que
les deux premiers ordres exercent naturellement sur le troisième.
III. Que la forme de convocation par Baillages et
Sénéchaussées, qui fut usitée dans des tems ou
les impositions étoient réparties dans cette espèce
de ressort, soit remplacée par une division de districts, laquelle
soit en même tems partie uniforme et constituante du système
d'administration ou Etats Provinciaux, que les peuples attendent de la
bonté du Roi, ensorte que les peuples s'assemblent où ils
contribuent et contribuent où ils s'assemblent, et quils aient plus
de facilité parmi des concitoyens qu'ils connoissent à faire
un bon choix de représentans.
IV. Que les représentans du Tiers-Etat, devant
être absolument purs et détachés de tous les
intérêts étrangers à l'intérêt commun
de cet ordre, il importe à celui des communes de la
Sénéchaussée de persévérer dans les exclusions
qu'elles ont délibérées jusques à ce qu'une
organisation sage et égale réunisse les intérêts
particuliers à l'intérêt commun; qu'en conséquence,
les personnes que leur état et leur profession mettent dans une
dépendance destructive de la liberté et de cette impartialité
de suffrages qui doivent caractériser les représentans d'une
Nation, ne puissent être électeurs ni éligible, tels
sont les agens du fisc, les dépositaires de quelque partie de
l'autorité roiale et les officiers et agens des seigneurs
ecclésiastiques et laïques
V. Les Etats Provinciaux, les assemblées
diocézaines ou de district et les municipalités étant
des administrations domestiques, c'est à la famille qu'il apartient
de choisir ses administrateurs, et les administrateurs ne doivent compte
de leur gestion qu'à la famille; d'ou il suit que nulle cour de justice,
ni aucun seigneur, ne doit avoir d'influence sur le choix des membres de
ces différentes assemblées, ni par conséquent de
compétence, pour juger les contestations qui peuvent s'élever
à raison de ce choix, ny pour tout ce qui concerne la comptabilité.
Les comptes des communautés doivent être rendus aux assemblées
de district, celles-ci doivent rendre comptes aux Etats Provinciaux, et les
administrateurs de la Province à une commission composée de
députés des trois ordres, choisis au scrutin pour cet effet.
VI. Que l'organisation des Etats Généraux
soit le modèle de l'organisation des Etats Provinciaux et des
assemblées municipales, en sorte que les mêmes formes et la
même composition y étant établies, un régime uniforme
et commun porte son influence dans toutes les parties du corps politique;
que Sa Majesté soit suppliée, en conséquence, d'ordonner
qu'il soit établi des Etats Provinciaux dans toute l'étendue
du Roiaume.
VII. Que les loix générales portées
par Sa Majesté dans l'assemblée des Etats Généraux,
et librement consentis par la Nation, soient adressées aux Etats
Provinciaux et administrations provinciales, pour y être inscrites
et observées, et à tous les tribunaux supérieurs et
inférieurs directement, pour servir de règle à leurs
jugements et à leurs arrêts, sans que ni ces assemblées
ni ces tribunaux puissent y aporter aucune modification, ni en arrêter
la publication ou exécution sous aucun prétexte, et qu'il soit
expressément statué que les cours souveraines ne pourront
désormais faire aucun règlement sur aucune sorte de matières.
VIII. La reconstitution des Etats Provinciaux de Languedoc
étant l'objet des réclamations universelles et multipliées,
non seulement de cette sénéchaussée mais encore des
trois ordres réunis de toute la Province, les députés
mandataires sont expressément chargés d'en demander, d'en
poursuivre et d'en accélérer la suppression et la reconstitution
auprès du Roi et des Etats Généraux, comme du voeu le
plus universel qui soit prescrit à leur persévérance,
les députés pourront donc voter aux Etats Généraux
sur l'impôt quy y sera déterminé, mais à la charge
et à condition qu'il ne sera réparti dans la dicte
sénéchaussée qu'après avoir obtenu la suppression
des Etats actuels de la Province, et une nouvelle constitution, libre,
élective et représentative; les communautés du pais
ne pouvant renoncer aux voeux qu'elles ont formées, aux protestations
qu'elles ont faites aux prétendus états derniers de la Province,
et qu'elles se proposent de réitérer à la commission
qu'elles ont données à leurs députés à
Paris, de poursuivre ladite suppression et reconstitution, protestations,
commission et voeux qu'elles confirment et renouvellent de plus fort, chargeant
de plus leurs députés mandataires aux Etats Généraux,
de continuer les opérations que les députés des trois
diocèses, de Nismes, Uzès et Alais, à Paris, auront
faites sur ces objets jusques à l'ouverture des Etats
Généraux.
Chapitre III: De l'administration de la
Justice.
Les députés du Tiers-Etat de la sénéchaussée
apporteront à l'assemblée des Etats Généraux
les demandes suivantes:
I. La confection d'un nouveau code civil et d'un nouveau
code criminel.
II. Que la vénalité des charges soit
abolie.
III. Que dans aucun cas, il n'y ait que deux degrés
de jurisdiction.
IV. Que dans aucun tribunal, le titre de Noble ne soit
nécessaire pour être juge.
V. Que la justice souveraine soit rapprochée
des justiciables, et surtout des habitans des campagnes.
VI. Qu'il soit représenté aux Etats
Généraux un projet d'arrondissemens ou districts, combiné
sur la consistance des lieux et des pais.
VII. Que dans les villes, bourgs et villages, les officiers
municipaux puissent rendre des jugemens sans apel en matière personnelle,
jusques à une somme modique, laquelle sera dans les Etats
Généraux fixée graduellement selon l'importance des
lieux.
VIII. Qu'il soit établi sous l'autorité
de la loi des tribunaux pacificateurs
IX. Que les codes civil et criminel soient simples,
clairs, et à la portée de tout le monde.
X. Que dans le code criminel, on observe que toute
la procédure se commence, se continue et s'achève en public,
qu'un conseil soit donné à l'accusé, et qu'on donne
toutes les facilités nécessaires aux prévenus pour mettre
au jour l'innocence.
XI. Que la rigueur des peines soit adoucie, et que
l'on abolisse toute distinction de supplices entre les diverses classes des
citoyens.
XII. Que la confiscation des biens des condamnés
soit abrogée, comme contraire à la Justice et à
l'humanité.
XIII. Qu'il ni ait qu'une seule classe de juges et
que tous les tribunaux d'exception soient supprimés, hors les juridictions
consulaires.
XIV. Que les justices seigneuriales soient supprimés
et que les propriétaires soient indemnisés.
XV. Qu'il soit établi des juridictions consulaires
dans les villes ou il y a quelque manufacture importante, ou quelque commerce
en activité, que leur attribution soit fixés à trois
mille livres, somme qui répond à celle de cinq mille livres,
qui leur fut attribuée au milieu du seizième siècle,
et que pour la ville de Nîmes en particulier, Sa Majesté soit
supliée d'ordonner l'exécution de l'Edit de 1710 qui lui accorde
une juridiction consulaire.
Chapitre IV: De la
Liberté.
I. Il sera représenté aux Etats
Généraux que la liberté des personnes doit être
sous la sauve garde des loix et Sa Majesté sera très humblement
suppliée d'abolir les lettres de cachet, et tous ordres arbitraires;
sauf à régler dans les Etats Généraux les
modifications nécessaires pour maintenir la sûreté de
la personne du Monarque et le repos de l'Etat, de contenir dans de justes
bornes les décrets des tribunaux judiciaires, souvent aussi arbitraires
que les lettres de cachet et toujours plus funestes, afin que la liberté
des hommes ne soit plus le jouet du caprice, de la vengeance, ni d'aucune
passion.
II. Il sera représenté sur la liberté
de penser que rien n'est plus digne de la sagesse de Sa Majesté que
d'avoir permis la libre profession de toute religion, fondée sur la
saine morale, seul moyen d'éclairer les hommes et de les porter à
la vertu; ouvrage sagement commencé par l'Edit de novembre 1787 et
qui attend son complément des vues supérieurs de Sa Majesté
et du progrès des lumières de la Nation.
III. Que la liberté de la presse soit
accordée, sauf aux Etats Généraux de chercher les moyens
d'en prévenir les abus, sans néantmoins qu'un aucun cas la
connoissance puisse en être attribuée aux cours, à moins
qu'il n'y ait partie civile plaignante.
IV. Que tous les privilèges exclusifs accordés
à des personnes et individus séparés soient abolies,
à la charge de rembourser ceux qui auroient été acquis
à prix d'argent.
V. Que les règlemens qui gênent les
manufactures soient supprimés, que les fonction de jurés priseurs
étant une source d'abus et de vexations, que la sagesse du gouvernement
à déjà voulu faire cesser, il soit pourvu au remboursement
de ces officiers, supprimés depuis quelque tems par une loi de Sa
Majesté.
VI. Que la libre circulation du commerce soit établie
dans tout le Royaume, que les douanes soient portées aux frontières
et que les droits de leude, péage, pulvérage, pontonage, minage
et autres qui gênent les routes et le commerce soient supprimés,
sauf à rembourser les propriétaires.
VII. Que les droits sur les cuirs, sur les peaux, les
papiers, les cartons, les huiles et savons soient supprimés.
VIII. Que tous arrêts de surséance, les
lettres de répit et arrêts de défense soient abolis.
IX. Que la liberté accordée aux
salpétriers de pouvoir arbitrairement faire des fouilles dans les
maisons, cours, caves, écuries, jardins et autres propriétés
foncières soit abolis, sauf aux propriétaires d'en accorder
la permission, comme ils aviseront.
Chapitre V: De
l'agriculture
I. Il sera très humblement représenté
à Sa Majesté que l'agriculture déjà surchargé
d'impôts, ne sçauroit en suporter d'avantage, et qu'elle doit
au contraire être soulagée et encouragée.
II. Que les deffenses de défricher les bois
et landes communes soient renouvellées, et que les deffrichemens ne
puissent avoir lieu sans le consentement des communautés.
III. Que les baux à ferme portés
au-delà de dis ans soient déclarés exemps du droit de
lods et de centième denier; qu'il en soit de même des baux à
engagement et antichrèse.
IV. Que les baux à ferme des ecclésiastiques
et des commandeurs de l'ordre de Malthe ne soient point résiliés
par la mort ni le changement de titulaire.
V. Que les propriétaires cultivateurs, les fermiers
cultivateurs et les artisans manouvriers soient exemps de payer l'impôt
connu sous le nom d'industrie.
VI. Que si l'on ne peut prévenir les
inconvéniens qui naissent de la distribution des biens des débiteurs
solvables, la procédure des criées soit simplifiée.
VII. Que chaque communauté soit authorisée
à lever à prix d'argent le nombre de miliciens auxquels elle
est tenue, et à imposer la dépense de la levée des soldats
provinciaux sur la généralité des contribuables de la
communauté.
VIII. Que les droits de controlle et de centième
denier soient diminués, simplifiés et plus proportionnés
entr'eux, que le tarif en soit plus clair et évident pour tout le
monde, et que la connoissance des contestations qui pourront se lever à
raison des droits du Roi quelconques, soit rendue aux juges ordinaires.
IX. Que l'Edit des hipothèques, dont les effets
sont onéreux aux peuples leur seroit plus utile s'il recevoit les
modifications suivantes: qu'une seule opposition pût suffire, que
l'acquéreur recevant du greffier un certifficat de publication fut
lû et publié à la messe du prône et affiché
à la porte de l'église de la paroisse où les biens
aliénés se trouvent situés, et que sur le vû du
certifficat de publication que le curé sera tenu de donner sur papier
simple et sans fraix, le greffier expédiera les lettres de ratisfication.
X. Que les baux à rente foncière, lesquels
en Languedoc ne transmettent pas la propriété, soient exempts
du centième denier.
XI. Que les contracts des ecclésiastiques soient
soumis au tarif du contrôle, de la même manière que ceux
des autres sujets.
XII. Que pour que les agriculteurs puissent fournir
plus abondamment du sel à leurs troupeaux, l'impôt de la gabelle
soit modifié.
XIII. Que l'imprescribilité des censives et
autres droits féodaux, ainsi que des obits, fondations et pensions
obituaires soit abrogée.
XIV. Que par des commissaires aux saisies ou autres
sages moyens, il soit remédié aux vexations dont les habitans
des campagnes sont affligés par les séquestrations.
XV. Que les fêtes soient transportées
au dimanche, les fêtes solemnelles exceptées.
XVI. Qu'il sera présenté que l'impôt
de la dîme, qui pèse uniquement sur le cultivateur, est
onéreux et nuisible à l'agriculture; qu'en conséquence,
Sa Majesté et les Etats Généraux seront supliés
de prendre cet objet en très grande considération.
XVII. Que tous les sujets indistinctement soient soumis
au logement des gens de guerre, les ecclésiastiques, les veuves et
les orphelins exceptés.
XVIII. Que les biens des religionaires fugitifs qui
sont en régie soient rendus aux familles de leurs premier possesseur
lorsque les requérants prouveront leur descendance, et même
aux héritiers directs, quoi que nés en pays étranger,
sous la condition qu'ils viendront s'établir en France.
XIX. Que les communautés riveraines qui fournissent
à la fois des hommes pour la mer et des soldats provinciaux, soient
exemptés de fournir à la milice, et qu'attendu les
inconvéniens qui résultent du choix souvent arbitraire qui
tombe sur des pères de familles et des gens âgés, lesdictes
communautés puissent faire des hommes en les prenant librement parmi
les matelots classés.
XX. Que Sa Majesté soit supliée
d'étendre les mêmes soins bienfaisans aux pêcheurs, cordiers
et tonneliers qui tirent au sort pour servir sur mer, et que les
communautés qui y sont sujettes puissent faire des hommes comme il
est demandé pour la milice.
XXI. Que Sa Majesté soit suppliée de
rendre communes au pais de Languedoc les Lettres Patentes données
pour la Guienne le 28 juillet 1786, concernant les relais et atterissemens
des fleuves, ainsi que ceux formés sur les rivages de la mer, sans
les usages locaux contraires
XXII. Que les constructions et réparations des
presbytères soient à la charge des décimateurs.
XXIII. Que tous droits seigneuriaux insolites, pesant
sur des communautés ou généralité d'habitans,
tels que ceux de banalité, péage, leude, pulvérage,
cabanage, courtage, minage, cartelage, rasoire, alluvion, droit d'aigage
et autres de même nature soient rachetables.
XXIV. Le Tiers Etat de la Sénéchaussée,
en mettant sous les yeux de Sa Majesté les très respectueuses
représentations de son bon peuple des campagnes, ne peut éviter
d'affliger son coeur paternel, en lui parlant des maux de cette partie
intéressante de ses Sujets. Il épargne à la
sensibilité de Sa Majesté le tableau douloureux de la misère
qui règne dans un grand nombre de contrées, surtout dans les
Cévennes, où les impôts levés pour le Prince sont
peut-être les moins onéreux, où le peuple peut à
peine se procurer la subsistance, où ce sont des haillons qui le couvrent
et de mauvais pain qui le nourrit; et ou des vexations d'autant plus faciles
qu'il est foible, et d'autant plus odieuses qu'il est malheureux, lui
enlèvent le fruit de ses travaux. Mais le Tiers Etat de la
Sénéchaussée place toute sa confiance dans le coeur
sensible et paternel de son Roi, digne imitateur du Grand Henri qui cherissoit
par dessus tout le peuple des campagnes; il met tout son espoir dans l'esprit
régénérateur d'un Monarque appellé par la Providence
à faire le Bonheur des François
Chapitre VI: Des établissemens utiles
et des réformes
I. Les députés mandataires
représenteront à Sa Majesté et aux Etats
Généraux qu'il est absolument nécessaire de venir au
secours de l'agriculture, toujours surchargée, toujours vexée
et par conséquent avilie, et tombant en décadence; que pour
cet effet il ne suffira pas de la soulager, mais qu'il seroit infiniment
utile pour la relever de donner des récompenses honorables aux
agriculteurs distingués, désignés par la voie publique
et par le libre suffrage de leurs concitoyens.
II. Qu'il soit cherché des moyens doux et sages,
et nullement vexatoires, pour abolir la mendicité.
III. Que les assemblées illicites de compagnons
et les associations connues sous le nom de Devoirs et de Gavots, soient
réprimées et deffendues; et qu'à cet effet, les
règlemens faits sur cet objet pour la ville de Paris soient rendus
communs à tout le Royaume.
IV. Qu'il ni ait dans tous les états de Sa
Majesté qu'un seul poids et qu'une seule mesure.
V. Qu'en conservant les prérogatives de chaque
ordre, il soit néanmoins établi des distinctions et des
récompenses particulières à chaque profession; que les
sujets du Tiers-Etat, qui composent toute la Nation, puissent entrés
au service et aux emplois militaires, et l'accès aux ordres
supérieur, afin que le droit d'être utile à la patrie
dans les emplois ne soit plus un privilège exclusif.
VI. Que la portion congrue des curés et des
cures, et des vicaires, soit portée à une somme convenable
à la dignité de leur ministère, suffisante pour leur
aider à fournir aux oeuvres de charité auxquels ils sont
apellés, et que le casuel soit supprimé.
VII. Que dans les lieux éloignés des
églises paroissiales ou qui en seront séparés par des
obstacles locaux, il soit établi des églises succursales aux
fraix du décimateur.
VIII. Que les buttes et annates soit abolies ou que
du moins, il soit affecté, pendant l'espace de douze ou quinze ans,
à une partie de l'acquit de la dette nationale.
IX. Que les sujets du Roi ne soient plus obligés
de recourir à la cour de Rome pour aucune dispense, et qu'ils puissent
les obtenir des évêques directement et gratuitement.
X. Que le nombre des notaires soit réduit,
qu'ils soient renfermés dans la seule fonction de leur office, sans
prétendre les exclure de la profession libre d'avocat; qu'ils soient
rendus dignes de l'importance de leur ministère, qu'ils ne puissent
pour cet effet occuper avant l'âge de vingt cinq ans, et que les
règlemens sur les dépôts de leurs actes soient
exécutés, pour en prévenir la dissipation ou la supression.
XI. Que les bois à brûler, devenant tous
les jours plus rares, cet objet soit pris en grande considération.
XII. Qu'il soit établi une éducation
nationale et uniforme, que le projet en soit communiqué aux Etats
Généraux.
XIII. Que les dons et pensions soient modérés
et que désormais la liste des pensionnaires du Roi et de l'Etat soit
imprimée et rendu publique, afin que les services honorés des
bienfaits du Roi servent d'encouragement, et que les usurpateurs du bien
public soient mieux connus de tout le monde.
XIV. Qu'il soit fait des recherches exactes sur
l'aliénation de certains domaines de la Couronne, et qu'à
l'égard des domaines eux-mêmes, il soit délibéré
dans les Etats Généraux, sous le bon plaisir du Roi, s'il ne
seroit pas plus utile à l'Etat et plus digne de la majesté
du Roi des François, d'en permettre désormais
l'aliénation en liant cette partie des finances au sistème
général qui pourra être proposé dans
l'assemblée nationale et agréé par Sa Majesté.
Chapitre VII: Des
impôts.
I. Les députés mandataires aux Etats
Généraux représenteront à cette assemblée
que la dette de l'Etat doit d'abord être veriffiée et
arrêtée dans les Etats Généraux, afin qu'elle
soit reconue dette nationale, comme ayant été contractée
sur la foi publique.
II. Que Sa Majesté ayant déclaré
qu'elle ne vouloit lever aucun impôt qu'il n'eut été
consenti par la Nation, il lui plaise de statuer que les subsides et emprunts
ne seront désormais établis qu'avec le libre consentement des
Etats Généraux, et pour le terme d'une assemblée nationale
à l'autre.
III. Que les trois ordres de l'Etat consentent et
répartissent l'impôt ensemble, en la même forme et de
la même manière.
IV. Que toutes les propriétés et revenus
réels soient soumis à l'impôt, dans les lieux où
ils sont situés, sans égard à la forme et à
l'état des propriétaires, ensorte que nul françois
n'en soit exempt.
V. Que l'impôt approche autant qu'il sera possible
de la simplicité et de l'unité, ensorte que tout françois
puisse en avoir une idée nette et claire.
VI. Que s'il est possible, la taille soit diminuée.
VII. Que le droit de franc-fief soit supprimé.
VIII. Que l'impôt soit tellement réparti
que les propriétés foncières et les fortunes
pécuniaires les paient également.
IX. Que la répartition des impôts soit
réglée sur les différentes provinces du Royaumes par
les Etats Généraux, qui en arrêteront le tarif proportionnel.
X. Que la répartition des subsides de chaque
province soit faite sur les districts par les Etats Provinciaux, sur les
paroisses par les assemblées de districts, et sur les contribuables
par les assemblées municipales.
XI. Que les recouvremens des subsides dans les districts
soit délivré chaque année à la moins dite, dans
la même forme que la levée des tailles dans les communautés,
sous caution et contre caution, et sous la garantie du district envers la
Province.
XII. Que le receveur ainsi établi soit tenu
de verser les deniers entre les mains du thrésorier de la Province
aux termes et conditions usitées.
XIII. Que le traitement du thrésorier de la
Province soit fixé, sans aucunes taxations proportionnelles aux subsides,
afin que le progrès de son opulence ne soit pas fondé sur
l'accroissement de la misère publique.
XIV. Qu'en un mot l'égalité de
l'impôt, se trouvant désormais consacrée par l'accord
des trois ordres et sanctionnée par la Nation et le Roi, il en soit
de même de l'égalité de la répartition.
XV. Que chaque année, et surtout à
l'issue des Etats Généraux le compte rendu des finances soit
rendu public par la voie de l'impression, et qu'il en soit de même
pour le compte rendu des Etats Provinciaux, qu'ainsi l'exemple du ministre
immortel qui en a donné le premier la leçon à ses
successeurs, soit désormais une loi nationale.
Pouvoirs.
Le Tiers-Etat de la sénéchaussée de Nismes, après
avoir succintement établi les principes qu'il juge à propos
d'opérer la régénération de l'Etat, exposé
les abus accumulés par le tems qui ont été la cause
de sa décadence, et respectueusement exprimé les voeux des
peuples, laisse à ses députés le soin de les modifier
lorsqu'ils croiront en leur âme et conscience que le bien public
l'exigera; il recommande à leur honneur et à leur probité
les intérêts d'un peuple qui, en se séparant, leur confie
ses droits; et il leur donne tout pouvoir pour proposer, remontrer, aviser
et consentir tout ce qui peut concerner les besoins de l'Etat, la réforme
des abus, l'établissement d'un ordre fixe et durable dans toutes les
parties de l'administration et la prospérité générale
du Royaume... (suit la liste des députés).
Livre des sources médiévales: [xyxy]: text sources from the now defunct Arisitum website. Contact Paul Halsall, halsall@murray.fordham.edu if any text is here improperly.