Livre des sources médiévales:
LA CHARTE-LOI DE BETISSART ACCORDEE
PAR JEHAN SEJOURNET LE 15 NOVEMBRE 1411
Auteur: Daniel Leclercq leclercq.daniel@unicall.be
(photos de l'auteur - tous droits réservés)
Contexte général
En 1324, Marguerite d'Avesnes épouse l'empereur Louis de Bavière.
Lorsque le comte de Hainaut Guillaume II décède, c'est Marguerite
qui hérite des Etats d'Avesnes. Le Hainaut passe petit à petit
à la maison de Bavière. En 1404, le fils d'Aubert de Bavière,
Guillaume IV devient comte de Hainaut. Il a 38 ans.
Chièvres, "bonne ville du Hainaut" depuis 1406, va connaître
un déclin inéluctable. Par contre, Ath se développe
de façon considérable. La deuxième enceinte urbaine
englobe une ville prospère (voir plan n°1 147 Ko). En 1394, la construction de l'église Saint-Julien est
entamée sur un terrain offert par Jean Séjournet
l'Aîné. Celui-ci devient seigneur de Bétissart dans les
dernières années de sa vie (Il meurt en 1414). Il accorde une
charte-loi à Bétissart le 15 novembre 1411.
Sans entrer dans les détails, peut-on imaginer comment était
la seigneurie de Bétissart au début du XVème siècle
?
La "réserve seigneuriale" nous est bien connue (1). Le château,
avec donjon sur motte, est entouré de huit tours et de douves. La
"cense seigneuriale" est située dans une sorte de presqu'île
qui renforçait la défense du château vers le nord. Les
bâtiments de cette ferme, encadrant un vaste terre-plein, étaient
très importants. Des terres labourables, des près, des jardins,
des vergers et des bois complétaient la réserve (voir plan n°2 93 Ko).
A côté de la réserve seigneuriale, on trouve les
"héritages". Le terme d'héritage a un sens très précis
: par opposition au fief, l'héritage est une terre louée moyennant
un cens perpétuel, héréditaire. Ce type de tenure comprenait
généralement un courtil (enclos où le manant
résidait), une maison, une ou plusieurs parcelles de terre, des
prairies,...
Une partie non négligeable des terres de la seigneurie constitue les
waréchaix. Les waréchaix désignaient certains fonds
de nature sur lesquels les habitants du village avaient des droits, moyennant
une redevance : faire paître les bestiaux, creuser la terre pour y
prendre du sable, de l'argile, des pierres,... Les waréchaix comprenaient
les chemins publics ("pires"), les places publiques ("trieux"), des terrains
incultes, les berges des cours d'eau.
La seigneurie est souvent désignée par le terme de ville (Lat.
villa). Le chef est en évidemment le seigneur (dans le texte de la
charte : ledit signeur, li dis sires,...). Il perçoit les redevances,
impose les corvées, désigne le maire, certains fonctionnaires.
Les échevins (eskevins) et le premier d'entre eux, le maire (li mayeur,
li maieur) tiennent en principe leurs pouvoirs du seigneur, maître
absolu quant à leur choix et à leur destitution éventuelle.
Nul tenancier ne pouvait se soustraire, sans motif légitime, à
l'accomplissement des fonctions échevinales. Elles étaient
obligatoires. Les attributions des échevins étaient à
la fois d'ordre judiciaire et administratif. Ils étaient garants des
droits du seigneurs, de la perception des redevances. Ils surveillaient le
commerce, contrôlaient les poids et mesures, procédaient à
l'afforage des vins, faisaient observer les règlements concernant
les waréchaix, les chemins publics, les clôtures,... En fait,
ils étaient les véritables dépositaires du droit et
des usages locaux.
Une série de fonctionnaires assermentés (messier, terrageur,
percepteur du tonlieu, forestier, reward,...) aident les échevins
dans l'exercice de leurs fonctions.
Les chartes-lois (2)
Les seigneuries médiévales ont longtemps vécu selon
des coutumes non écrites, sous l'autorité d'un "seigneur".
Vers le Xème siècle, la nécessité d'un contrat
entre seigneur et population apparaît. C'est ainsi que sont
promulguées les premières chartes-lois. Celle de Chièvres
est particulièrement remarquable (3). Mais il s'agit là de
chartes concernant des communautés arrivées au stade
pré-urbain voir même urbain. En ce qui concerne les
communautés strictement rurales, le mouvement est un peu plus tardif.
L. VERRIEST parle alors de "lois de chefs-lieux". La plus ancienne est celle
de Genly (1322). Toutefois c'est surtout à partir de 1410 que se
multiplient les "lois" au style de Mons (comme celle de Bétissart
- 1411 ou Ormeignies - 1413). La charte de chef-lieu de la Rosière
(dépendant de Valenciennes) est de 1521-1543.
Par l'octroi des chartes-lois, les seigneurs n'abandonnent pas tous leurs
droits. Ils y trouvaient d'ailleurs leur compte notamment dans le fait que
ces textes confirment leurs droits de percevoir des redevances dans un cadre
strictement seigneurial.
Pourquoi "Loi de chef-lieu" ?
La première codification des coutumes de Mons date du 10 mai 1410,
sous Guillaume IV de Bavière. Les coutumes en usage dans les diverses
seigneuries relevant du chef-lieu de Mons (ou Valenciennes) sont alignées
sur le "chef de sens". C'est auprès du prévôt, du maire
et des échevins du chef-lieu que les échevins des seigneuries
sollicitaient l'avis en cas de procès complexe, par ce qu'ils se sentaient
incompétents ("mie saiges").
Par l'ensemble de leurs dispositions, les lois de chef-lieu ont visé
à assurer le respect de la propriété et des droits
individuels et à garantir l'ordre et la police des campagnes. Aisements
communs, conservation et entretien des waréchaix et des chemins publics,
curage des rivières et des fossés, poids et mesures, ventes
des denrées, police des moeurs, crimes et délits, procédure
judiciaire, pouvoirs des messiers, terrageurs, forestiers et autres
fonctionnaires.
Les lois de chef-lieu ont achevé de donner aux vilains les garanties
dont leur travail avait besoin.
Le texte de la charte-loi de Bétissart
L'original de la charte-loi de Bétissart est perdu. Il a disparu lors
de l'incendie du Dépôt des Archives de l'Etat à Mons,
le 16 mai 1940. Maurice VAN HAUDENARD avait, heureusement copié le
registre.
"Le recueil était intitulé au dos : Registre des seigneurs
justiciers qui ont demandé de nouvelles loix au chef-lieu de Mons
de 1396 à 1426."(4).
On y trouvait notamment les "lois de chef-lieu" des seigneuries de
Bétissart (fol. 36) et d'Ormeignies (fol. 65 v°).
Le contenu de la charte-loi de Bétissart
La charte-loi de Bétissart énumère, dans ses 35 articles
constitutifs, une série de situations où des peines (amendes)
étaient prévues (par exemples : lx s. blanz = 60 sols blancs,
vij s. vj d. blz = 7 sols 6 deniers blancs, etc. Une livre est divisée
en 20 sols de 12 deniers)
Le lecteur trouvera en annexe le texte intégral de la charte, tel
que nous l'a transmis M. VAN HAUDENARD. Le français du début
du XVème est encore relativement éloigné du nôtre.
C'est pourquoi nous en proposons un résumé commenté
(5). Les numéros des articles sont entre crochets "[]".
- [1-4] Coups et blessures.
Dans les affaires de coups et blessures, on distinguait généralement
les coups "sans kéure"(= sans abattre), où la victime ne tombait
pas, les coups "dont on kéoit" et ceux qui provoquaient une effusion
de sang, provoquée ou non par une arme "esmoulues", c'est-à-dire
tranchante.
Les amendes étaient proportionnelles à la gravité des
faits. La nuit, les peines sont doublées.
Lorsque l'affaire est complexe (absence de preuves par exemple), on s'en
réfère à l'autorité du chef-lieu (Mons).
- [5] Le "dédit d'échevin"
Le "desdit d'eskievins ". Blâmer ou contrarier un acte ou une
décision de l'autorité échevinale était
considéré comme très grave.
- [6-7] Vente d'héritage. La saisine.
En ce qui concerne les ventes d'héritages, les échevins devaient
constater et ratifier d'abord la "dessaisine" du vendeur puis la "saisine"
de l'acquéreur. C'est entre les mains du maire que l'opération
se pratique.
- [8-9] Protection des waréchaix.
Dans l'intérêt de tous, les waréchaix ne devaient être
amoindris en aucune façon. On ne pouvait pas "empirer" les places
publiques ou les chemins. Lorsqu'un manant y avait prélevé
de l'argile ou des moellons, il était tenu, sous peine d'amende, de
remettre les lieux en état.
- [10-11] Dommages à la terre ou à la clôture d'autrui.
L'intérêt général commandait de veiller avec soin
à ce qu'aucun empiétement ne fût fait sur les
waréchaix. Les manants avaient l'obligation de "renclore" leurs
héritages, d'en marquer les limites par une haie, un fossé.
Chaque année, un ban spécial, le "ban de mars" leur rappelait
cette obligation et l'amende encourue en cas de non respect.
- [12-13] Réglementation des moeurs
Interdiction de jouer aux dés. L'amende est la même (7 sols
6 deniers) pour celui chez qui on joue. Elle est doublée si on joue
pendant la nuit.
La prostitution est réprimée. On ne peut tenir une maison mal
famée la nuit.
- [14-18] Désignation et pouvoir des fonctionnaires
La collectivité a des fonctionnaires (messier, terrageur, reward,...)
que le maire et les échevins assermentent et que souvent, ils nomment
avec le concours de "la plus saine partie des bonnes gens".
Le messier est le garde-champêtre : messium custos.
Le terrageur est le percepteur du droit de terrage. Le terrage était
la prestation au profit du seigneur d'une part des fruits des terres
labourées. Il se prélevait uniquement sur les céréales.
C'est pourquoi on le calculait en gerbes. Pour prévenir toutes fautes,
le seigneur nommait chaque année un terrageur, agréé
par le maire et les échevins (qui reçoivent son serment). Son
rôle était de se rendre sur les champs et de faire la part des
gerbes qui revenaient au seigneur et au tenancier. Il surveillait
éventuellement le transport du terrage à la grange. Il était
tenu de faire rapport à l'échevinage, généralement,
le jour de la Saint-Rémi. Le laboureur coupable d'avoir emporté
ses récoltes avant le passage du terrageur était passible d'une
amende de 60 sols. Cette amende très élevée (identique
à l'effusion de sang) montre l'importance qui était donnée
à ce délit.
Le forestier a la charge de surveiller les bois, de constater et réprimer
les dommages faits par les bêtes ou les coupes. Les bois étaient
utilisés dans l'élevage du bétail qui pouvait y paître
à certaines époques de l'année, sous certaines conditions.
Ils fournissaient le combustible. Les manants pouvaient ramasser les branches
mortes, les feuilles. Il était cependant interdit d'endommager le
vif-bois. Les arbres portant des fruits (chênes, hêtres, pommiers,
néfliers) étaient protégé davantage (60 sols
d'amende pour le chêne, 22 seulement pour le bois blanc dans notre
charte).
Le percepteur du tonlieu était chargé de percevoir le droit
payé pour l'entrée des marchandises dans la seigneurie.
- [19] Réfection des chemins.
La charge incombait aux tenanciers, dans toutes les seigneuries, d'entretenir
et de réfectionner les chemins vicinaux. Il ne s'agit pas d'une
véritable corvée accomplie au profit du seigneur par ses sujets,
mais plutôt de travaux d'utilité publique. Certaines chartes
prévoient une époque fixe pour exécuter les corvées.
A Bétissart, elles sont à la volonté du seigneur. Souvent,
le mois d'août (moisson) est exclu.
- [20] Contrôle du pain par un reward
Le reward est un fonctionnaire communal assermenté. Il est ici
chargé de contrôler la qualité et le poids du pain.
- [21-24] Afforage des boissons.
Les afforages sont des redevances qui frappent la vente du vin, de la
bière, de la miellée ou de l'alcool. L'afforage était
en réalité la mise en perce des fûts et la fixation du
prix de vente, selon la qualité des produits, par l'autorité
échevinale.
A défaut d'avoir fait afforer ses boissons, le débitant est
passible d'une amende au profit du seigneur. Les afforages consistaient dans
le prélèvement proportionnel d'une partie des boissons ou dans
le paiement d'une somme équivalente
- [25-28] Poids et mesures.
Une place importante est consacrée aux mesures, aux poids, aux aunes.
Les références en la matière sont celles qui sont en
vigueur au chef-lieu, Mons.
Une "répression des fraudes" est instaurée.
- [29] Contrôle des denrées.
Les échevins contrôlent la qualité de la viande, mais
aussi du poisson et d'autres nourritures. Il est parfois indiqué que
les denrées impropres à la consommation doivent être
enterrée.
- [30] Construction d'une maison ou d'une clôture sur un
héritage attenant aux waréchaix.
- [31] Contestation du "cerquemanage".
Cerquemaner, c'est faire une visite judiciaire au cours de laquelle les
échevins examinent l'état des chemins et des terres, prescrivent
la réfection des routes, la taille des haies, la rectification des
limites. Le tenancier doit demander l'autorisation pour bâtir sur un
terrain attenant au domaine public.
- [32] Injure à échevins.
Cet article montre l'importance de la fonction des échevins. C'est
le seul cas où l'on parle de prison.
- [33-35] Réglementation concernant le bétail.
Par exemple, les pâturages communs sont strictement réservés
aux bêtes de la commune.
Conclusion
La charte-loi de Bétissart, par son caractère général,
ne nous permet évidemment pas de nous faire une image exacte de la
vie quotidienne dans notre village il y a 500 ans. Nous pouvons cependant
affirmer que nos ancêtres étaient déjà
préoccupés par des considérations sociales, morales,
écologiques, de gestions du territoire et des forêts. Les
règlements contenus dans la charte-loi en font foi. C'est pour cela
qu'elle est un témoignage non négligeable dans la connaissance
de cette époque lointaine.
ANNEXE : TEXTE DE LA
CHARTE
Articles constitutifs
[Premiers], de lois toucquans à sang (6) et à burine (7)
il demande à avoir pour main mise (8)... xl s. blanz (9).
Item de sang fait sans armes esmoulues (10) ... c s. blanz.
Item pour armes esmoulue supposet que sang y ait u non ... xl s. blz.
Item si ces meslées (11) adviennent par nuit, qu'elles soient
doublées.
[2] Item, s'il y avoit keure (12) et chuils s'en volzist plaindre, avoir
en deveroit li Keus qui sen plainderoit, sil le keure estoit moustrée
(13), lxij s. vj d. blz tout premiers, et ainschois que li d'autruy, sour
l'amende de xxvij d. blz de lois.
[11] Item, que nuls ne fache en aoust ne en autre tamps autrui damage
en ses ahans (31), en ses courtilages (32), en ses fruis, ne en aultre maniere
sour vij s. vj d. blz de lois pour les camps, et en courtillages v s. blz,
et le damage rendre.
[12] Item, que nuls ne jeuwe as deis, sour vij s. vj d. blz, et otant
sour celui qui en tenroit l'ostage. Et se ce advenoit par nuit, que ces amendes
doublaissent.
[13] Item, que nuls ne tiegne mauvais hostage (33) de nuit sour otelles
lois.
[14] Item, qu'uns messiers (34) soit eslus, créés et sermentez
(35) par li mayeur et eskevins et le plus saine parties des bonnes gens ahaniers
(36) dou lieu, et creus de ses rapors, mais qu'il les face en tamps et en
lieu compétent.
[15] Item, que uns terragiers (37) soit eslus par ledit signeur et sermentet
par li maieur et eskevins pour y estre creuws de ses rappors qu'il soient
rendeus le jour Saint Remy (38), et que cascune amende soit de lx s. blz.
[16] Item, que li dis sires puist eslire I forestier et ycelui faire
sermenter par devant mayeur et eskevins et yestre creuws de ses rappors par
son serment, en tel maniere que s'il rapporte biestes qui ayent fait damage
en bos (39), elles soient à otelles lois et par tel maniere que devant
est dit, et le damage rendre. Et se il rapporte gens ayant coppet verts bos
(40), chil soient pour le coppage de bos de kaisne à lx s. blz, et
pour le blancq bos a xxij s. blz de lois, u en telles lois qu'il a pour tel
cas ès bos voisins dessous et deseure.
[17] Item, que nuls ne karie les biens d'autruy ne en chemins kariaules,
sour l'amende de v s. blz dou kar et ij s. vj de le karette, se callengiet
et rapportet en sont par le messier, et le damage rendre, comme dit est.
[18] Item, que led. sires puist eslire et sermenter devant eskevins
I tonnuyers (41) pour rapporter et y estre creuws des deffautes de ses tonnieux
emportés, sour lx s. blz d'amende celui qui le fourferoit.
[19] Item, que cascuns kiefs d'ostel (42) u personne pour le faire soit
tenus de aider à refaire les voies et quemins dou lieu (43), toutes
fois que par besoing il seroit commandet de par ledit signeur (44), sour
xxvij d. blz de lois.
[20] Item, que certains rewars (45) soient creet et sermentet par le
mayeur, eskevins pour rappors faire sour toutte denrée de blancq pain
u noir, qui se vendera u mettera à vente en ledite ville ; et que
chils qui sour ledit rapport soit trouvés avoir petit pain soit pour
cascune fie à l'amende de vij s. vij d. blz et le pain acquis au signeur,
avoecq le vendage avoir pierdut xl jours après, et ossi aux fraix
de le loy, se plainte s'en faisoit, sci avant que lois donroit.
[21] Item, que nuls es dite ville ne vende vins ne chiervoises ne autres
buvrages sans afforer (46) par le maïeur et eskevins, sour vij s. d.
blz de lois.
[22] Item, que nuls depuis que afforees sera ceste denrée, soit
tenue nettement et loyalement sans empirer, sur l'amende de vij s. vj d.
blz, et avoecq cele denrée yestre acquise au signeur. (47)
[23] Item, que de vin et de cervoise afforages soient payés,
assavoir dou kar de vin iiij lots et d'une karette ij lots, et d'un brassin
de cervoise qui se feroit en ces dites villes iiij lots. (48)
[24] Item, que nuls n'escondisce de ces buvrages à délivrer
se afforet estoient, parmy ce qu'on lui baillece argent u boin wage (49),
sour vij s. vj d. blz de lois, mais que li requeste de ce avoir ne fust hors
heure de traire.
[25] Item, que nuls ne mesure (50) fors a telles mesures qu'il a à
Mons ; c'est à entendre que les mesures des bonnes gens soient par
le mayeur et les eskevins portés u faites porter avoecq yaux en ledite
ville de Mons pour ycelles justeffyer et ensaigner, et ce despuis en avant
sont trouvées autres que boines mais que deuwement plainte par loy
en soit faite, que cascun soit pour l'amende de ses mesures, soit pour plusieurs
u pour une, et toutes fois que en deffaute en soit trouvés, à
lx s. blz d'amende, et as frais si avant que lois le donnoit, et les dites
mesures trouvées u une en deffaute acquis au signeur.
[26] Item, en otel maniere soit fait des pois et que nuls ne poise d'autre
pois que il a à Mons et sour otel amende comme des mesures.
[27] Item, que nuls ne aulne draps ne autres denrées a autre
aulne qu'il a à Mons, sour enkeir en otelle amende que de lx s. blz,
se trouvée estoit fausse et l'aune perdue.
[28] Item, que nuls ne nulle ne mesure, aune, ne poise que ce ne soit
bien et loyaulement pour les acateurs avoir leur droit, sous lx s. blz d'amende
et pierdre tout ce que petitement aroit esté mesuret, aunet, et peset,
parmy chou que le propre heure u jour de le deffaute chil u chuils que ce
damage aroient u aroit rechupt le raportassent au maieur et as eskevins dou
lieu, mais que ce fuissent gens créables et sans maise ocquisons (51),
et que lidit eskevins le jugaissent s'il y vèoient locquision
apparant.
[29] Item, que nuls macheliers (52) ne autre ne puist vendre chars (53)
ne autres denrées qui ne soit bonne et layaul, passans au rewart desdis
eskevins, qu'il ne soit, se dou mayeur plainte s'en fait, a vij s. sij d.
blz de lois.
[30] Item que nuls qui ait heritages tenans es pires (54) u wareskaix
ne maisonne sour yceluy ou dessoivre (55), sans le avoir premiers remonstret
au maïeur et eskevins, par quoy on puyst cherquemaner (56) se li fais
le requiert, sour vij s. vj d. blz de lois.
[31] Item, que se cascuns au férir son colp pour cause de
cerquemanaige contre pire u wareskais, ne disoit je fierche mon colp comme
pour mon hiretage u sci avant que loyauls cerquemanaiges le me donroit, que
chuils, se plainte s'en faisoit par le mayeur, fust fourfais en amende à
l'ordonnace de le loy doudit kiefliu.
[32] Item, qui diroit lait (57) à eskevins pour cause rewardant
leur offisce, il soit corrigiés de prison, de voyages à
l'ordonnance dou kief lieu de Mons.
[33] Item, qui rescouroit ses biestes u sen pan au messier u a celui
qui pris les aroit en son damage, il soit a vij s. vj d. blz de lois, sour
le serment et rapport de celui à cui elles aroient estet rescousses
(58)
[34] Item, qu'il ne soit nuls qui hierberge biestes estraignières
pour campyer sur les heritages u pasturages de lad. ville, sour l'amende
de ij s. blz cascun jour et ossi sera, chiux cui les biestes seroient, a
otelle amende cascun jour et pour cascune bieste quelle que elle soit.
[35] Item, que nuls afforains de dehors ledite ville ne mainèche
u ne fache menser ses biestes en pasture en nul tamps sous les relais u communs
assennes de ledite ville, sur ij s. blz pour le cheval u jument; item pour
le bieste a corne, xij d. blz ; pour un pourchiel u blencq bieste, vj d.
blz, et pour le foucq de pourchiaux u de blanques biestes, vj d. blz.
NOTES
1. Voir nos articles sur la seigneurie de Bétissart dans
les numéros 6 et 7 du Bulletin de liaison des amis d'Angélique
de Rouillé.
2. L. VERRIEST, Le Régime seigneurial dans le comté
de Hainaut du XIème siècle à la Révolution,
Louvain, 1916-1917 et L. VERRIEST, Corpus des records de coutumes et des
lois de chefs-lieux de l'ancien comté de Hainaut, Mons et Frameries,
1946
3. M.-A. ARNOULD, Le plus ancien acte en langue d'oïl
: la charte-loi de Chièvres (1194), in Hommage au professeur
Bonnenfant..., Bruxelles, 1965, pp 85-118. Le lecteur pourra aussi trouver
une orientation bibliographique dans C. BRONCHART et D. LECLERCQ, 1194-1994,
Il y a 800 ans, la charte-loi de Chièvres, Bibliothèque Communale,
Chièvres, 1994, pp 32 à 35 (Une deuxième édition
corrigée et augmentée est en cours).
4. M. VAN HAUDENARD, Chartes-lois accordées aux
échevinages soumis au chef-lieu de Mons en Hainaut (1396-1445),
dans Bulletin de commission royale d'histoire, CVIII, Bruxelles, 1943, pp
61 et suiv.
5. Les commentaires sont largement inspirés de : VERRIEST, Le Régime seigneurial ..., passim.
6. Dans les affaires de coups et blessures, on distinguait
généralement les coups "sans kéure"(= sans abattre),
où la victime ne tombait pas, les coups "dont on kéoit" et
ceux qui provoquaient une effusion de sang. Les amendes étaient
proportionnelles à la gravité des faits.
7. burine = querelle où l'on se dit beaucoup d'injures
8. Action de mettre la main, de battre (= coup)
9. s = sol ; d = denier ; L = livre tournois
10. Tranchante et aiguë
11. Querelle, lutte, combat
12. Si la victime reçoit des coups qui la font tomber (Picard
: kéu = tombé, en français : chu)
13. Prouvée
14. Lorsque l'affaire est complexe (ici, une absence de preuves),
on s'en réfère à l'autorité du chef-lieu
15. Plainte, requête
16. respeux = réponses produite contre une plainte devant
la loi échevinale
17. plaintes : premières écritures que l'on fait
dans un procès.
18. Héritages.
19. Il s'agit ici du "desdit d'eskievins ". Le fait de blâmer
ou de contrarier un acte ou une décision de l'autorité
échevinale était considérée comme extrêmement
grave. L'amende est très élevée.
20. En ce qui concerne les ventes d'héritages, les
échevins devaient constater et ratifier d'abord la "dessaisine" du
vendeur puis la "saisine" de l'acquéreur. C'est entre les mains du
maire que l'opération se pratique.
21. Autorisation
22. Ayant puissance
23. Creuse
24. Empierre
25. Waréchaix
26. Dans l'intérêt de tous, les waréchaix
ne devaient pas être amoindris en aucune façon. C'est pourquoi
on ne pouvait pas "empirer" les places publiques ou les chemins. Lorsqu'un
manant, usant de son droit, y avait prélevé de l'argile ou
des moellons, il était tenu, sous peine d'amende, de remettre les
lieux en état.
27. Peine, amende
28. L'intérêt général commandait de
veiller avec soin à ce qu'aucun d'empiétement ne fût
fait sur les waréchaix. Les manants avaient l'obligation de "renclore"
leurs héritages, d'en marquer les limites par une haie, un fossé.
Chaque année, un ban spécial, le "ban de mars" leur rappelait
cette obligation et l'amende encourue en cas de non respect.
29. Oter
30. Clôture, palissade, haie
31. Terres labourées
32. Petite cour de campagne clôturée de haies, jardin
potager
33. Maison mal famée
34. Garde-champêtre (messium custos)
35. La collectivité a des fonctionnaires (messier, terrageur,
rewards,...) que le maire et les échevins assermentent et que souvent,
ils nomment avec le concours de "la plus saine partie des bonnes gens".
36. Laboureurs
37. Percepteur du droit de terrage. Le terrage était la
prestation au profit du seigneur d'une part des fruits des terres
labourées. Il se prélevait uniquement sur les céréales,
C'est pourquoi on le calculait en gerbes. Pour prévenir toutes fautes,
le seigneur nommait chaque année un terrageur, agréé
par le maire et les échevins (qui reçoivent son serment). Son
rôle était de se rendre sur les champs et de faire la part des
gerbes qui revenaient au seigneur et au teancier. Il surveillait
éventuellement le transport du terrage à la grange. Il était
tenu de faire rapport à l'échevinage, généralement,
le jour de la Saint-Rémi. Le laboureur coupable d'avoir emporté
ses récoltes avant le passage du terrageur était passible d'une
amende de 60 sous. Cette amende très élevée (identique
à l'effusion de sang) montre l'importance qui était donnée
à ce délit.
38. 1er octobre
39. Les bois étaient utilisés dans l'élevage
du bétail qui pouvait y paître à certaines époques
de l'année, sous certaines conditions.
40. Les bois fournissaient le combustible. Les manants pouvaient
ramasser les branches mortes, feuilles. Il était cependant interdit
d'endommager le vif-bois. Les arbres portant des fuits (chênes,
hêtres, pommiers, néfliers) étaient protégé
davantage (60 sous d'amende pour le chêne, 22 seulement pour le bois
blanc dans notre charte).
41. Percepteur du droit de tonlieu, droit payé pour
l'entrée des marchandises.
42. Chef de famille
43. La charge incombait aux tenanciers, dans toutes les seigneuries,
d'entretenir et de réfectionner les chemins vicinaux. Il ne s'agit
pas d'une véritable corvée accomplie au profit du seigneur
par ses sujets, mais plutôt de travaux d'utilité publique.
44. Certaines chartes prévoient une époque fixe
pour exécuter les corvées. Dans ce cas, elles sont à
la volonté du seigneur. Souvent, le mois d'août (moisson) est
exclu.
45. Le reward est un fonctionnaire communal assermenté.
Il est ici chargé de contrôler la qualité et le poids
du pain.
46. Evaluer, taxer les liquides. Les afforages sont des redevances
qui frappent la vente du vin, de la bière, de la miellée ou
de l'alcool. L'afforage était en réalité la mise en
perce des fûts et la fixation du prix de vente, selon la qualité
des produits, par l'autorité échevinale.
47. A défaut d'avoir fait afforer ses boissons, le
débitant est passible d'une amende au profit du seigneur.
48. Les afforages consistaient dans le prélèvement
proportionnel d'une partie des boissons ou dans le paiement d'une somme
équivalente
49. Gage
50. Une place importante est consacrée aux mesures, aux
poids, aux aunes. Les références en la matière sont
celles qui sont en vigueur au chef-lieu, Mons. Une "répression des
fraudes" est instaurée.
51. Mauvais prétexte
52. Boucher
53. Chair
54. Chemins empierrés
55. Limite
56. Cerquemaner, c'est faire une visite judiciaire au cours de
laquelle les échevins examinent l'état des chemins et des terres,
prescrivent la réfection des routes, la taille des haies, la rectification
des limites. Le tenancier doit demander l'autorisation pour
57. Dire des injures
58. Repris avec violence
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