LXXIII - 19 Fructidor an V (5 septembre
              
              
              1797) 
             Rapport du bureau central du 20 fructidor (Arch.
              
              
              Nat., AF IV, 1478). 
             Esprit public. - Les esprits sont généralement animés
              
              
              des meilleures dispositions ; ce premier aspect de frayeur que les
              
              
              événements avaient donné à un assez grand nombre
              
              
              de citoyens a totalement disparu. Le cours des habitudes est repris de tout
              
              
              côté presque comme à l’ordinaire, il y a moins de
              
              
              désapprobateurs de tout ce qui vient d’être fait par les
              
              
              autorités; seulement on témoigne de l’inquiétude sur
              
              
              le brisement et l’anéantissement des ateliers de quelques imprimeurs,
              
              
              et l’on disait que c’était une violation de l’arrêté
              
              
              du Directoire. Il perce des lueurs de mécontentement qu’un assez grand
              
              
              nombre de citoyen concentre au milieu et au sujet des circonstances actuelles;
              
              
              l’égoïsme est tel dans la classe ou des gens aisés ou
              
              
              des personnes livrées au commerce que l’on est sûr de
              
              
              n’être pas atteint. Au surplus, dans cette partie de la
              
              
              société, plus encore que dans toute autre, on éprouve
              
              
              et on manifeste le plus grand éloignement à se mêler
              
              
              d’aucune affaire publique. L’esprit de l’intérieur des familles et
              
              
              des états de moyenne fortunes est celui d’une inquiétude assez
              
              
              vive sur les suites de ces journées, dans l’appréhension où
              
              
              l’on est que des patriotes exagérés ne cherchent à souiller
              
              
              de vengeance et de sang le triomphe du Gouvernement sur ceux qui en fomentaient
              
              
              la ruine. 
             Dans tous les cafés et autres lieux de réunion qui composaient
              
              
              autrefois le quartier dit Saint-Germain, on est doublement content, et de
              
              
              ce que le gouvernement, en prévenant sa perte a sauvé la France
              
              
              des horreurs de la guerre civile, et de ce que la déportation et non
              
              
              la mort sera la seule peine infligée aux coupables de conspiration.
              
              
              Le voeu assez unanime du public est aussi pour la déportation des
              
              
              journalistes auxquels, non seulement les amis, mais aussi quelques ennemis
              
              
              de la République eux-mêmes, font les plus sanglants reproches.
              
              
              Ces derniers n’inspirent en quelque sorte aucun intérêt ; il
              
              
              est d’autres endroits où l’on en donne à quelques-uns des
              
              
              députés condamnés à la déportation, encore
              
              
              les sentiments y sont très partagés. Partout d’ailleurs on
              
              
              est assez content des exceptions faites en faveur de Thibaudeau et de
              
              
              Doulcet-Pontécoulant. 
             On est convaincu que des entrepreneurs de travaux cherchent à persuader
              
              
              aux ouvriers qu’ils occupent, que ce sont les Jacobins qui vont reprendre
              
              
              leur ancien train, que l’on va rétablir le papier, la guillotine,
              
              
              etc..., qu’il ne reste plus que des députés montagnards. Ces
              
              
              suggestions sont très répandues et tiennent bien des citoyens
              
              
              faibles et surtout des femmes sous l’impression d’une espèce de terreur.
              
              
              A cela il faut ajouter que d’autres ennemis de l’ordre actuel des choses
              
              
              inspirent toutes sortes d’inquiétudes au peuple sur les subsistances
              
              
              ; on prend dans certains arrondissements plus de pain que de coutume chez
              
              
              le boulanger et quelquefois leurs fournées n’ont point suffi aux demandes.
              
              
              On voit, en revenant sur les événements, qu’ils n’ont pas fait
              
              
              verser de sang ; on espère même que le grand changement
              
              
              s’opérera sans qu’il y en ait une seule goutte répandue. Cette
              
              
              idée a reconquis bien des coeurs au Gouvernement, et la majorité
              
              
              des habitants de Paris approuve toutes les mesures qu’il a prises. 
             Spectacles.- Ils n’ont rien offert de remarquable. La tristesse y
              
              
              était peint dans les yeux de ceux que l’on y croit habitués.
              
              
              Du reste beaucoup de calme et nulle application... 
             LIMONDIN. 
              
            
             LXXIV - 20 fructidor an V (6 septembre
              
              
              1797) 
              Rapport du bureau central du 21 fructidor - (Arch.
              
              
              Nat., AF IV, 1478). 
             Esprit public. - On découvre dans le public deux caractères
              
              
              aussi marquants qu’opposés : d’un côté un air de peur
              
              
              et de mécontentement, de l’autre une exaltation qui dépasse
              
              
              les bornes de l’humanité, mais cette dernière opinion est celle
              
              
              d’un assez petit nombre ; on y a entendu des citoyens désirer que
              
              
              les conspirateurs fussent conduit à la guillotine, présumant
              
              
              que, s’ils eussent réussi dans leurs projets, ils eussent fait massacrer
              
              
              les patriotes. « Si l’on nous confie la conduite des prisonniers du
              
              
              Temple, on dit ailleurs des militaires échauffés, leur affaire
              
              
              sera bientôt faite, nous les funisserons en route. » Cependant
              
              
              les dispositions des chefs militaires, partout où il s’en trouvait
              
              
              de réunis, étaient beaucoup plus modérés et plus
              
              
              indulgentes. 
             On remarque un profond silence parmi les citoyens qui désapprouve
              
              
              les derniers événements ; mais un sentiment, qui domine dans
              
              
              tous les lieux publics, est celui d’une vive satisfaction de ce que la
              
              
              journée du 18 fructidor et les changements qu’elle a opérés
              
              
              n’auront coûté la vie à aucun citoyen. On a vu aussi
              
              
              renaître une nouvelle sécurité au départ des troupes
              
              
              dont il reste une bonne idée dans l’esprit des citoyens de bonne foi.
              
              
              Ces derniers de plus regardent comme indispensables pour prévenir
              
              
              de grands troubles les mesures prises d’urgences par les autorités
              
              
              en ce moment ; cependant ils croient que le danger de la chose publique
              
              
              n’est plus assez sensible pour que les autorités suspendues tardent
              
              
              à reprendre leurs fonctions. - Il n’est pas rare de rencontrer des
              
              
              personnes inquiètes que les partisans de la Terreur ne cherchent à
              
              
              ramener le régime de l’anarchie. Cette crainte est très
              
              
              répandue, et quelques propos entendus dans la classe ouvrière
              
              
              contribuent à l’entretenir. Pour manifester ouvertement leur opinion,
              
              
              ceux qui désapprouvent les événements actuels
              
              
              appréhendent que les députés arrêtés ne
              
              
              soient d’avance destinés à périr ; ils semblent insinuer
              
              
              ou qu’on les fera périr à la Carrier, suivant leur propre
              
              
              expression, ou qu’une fois en mer, on les fera échouer à propos. 
             Lorsqu’il a été question de la destruction des pièces
              
              
              de quelques imprimeurs, cet excès a été souvent excusé
              
              
              par la licence effrénée des écrits royalistes qui avaient
              
              
              perverti l’opinion publique depuis des mois entiers ; on gémissait
              
              
              malgré ce raisonnement d’une destruction qui ne pouvait tourner au
              
              
              profit de qui que ce fût. 
             Le bruit s’est répandu qu’à Tours de violents troubles
              
              
              étaient sur le point d’éclater à l’occasion d’un spectacle
              
              
              intitulé: Spectacle des Honnêtes gens, par opposition
              
              
              aux républicains qui se trouvent dans cette commune. On disait aussi
              
              
              qu’à Rouen, à Lyon et quelques autres villes du Midi les royalistes
              
              
              avaient été fusillés. 
             Quoique l’inquiétude soit sensible dans une partie du public, le calme
              
              
              est cependant garanti par l’opinion de la majorité qui n’a heureusement
              
              
              plus qu’à recueillie dans la conclusion de la paix le fruit des derniers
              
              
              événements. 
             Spectacles.- L’opinion s’y est fortement manifestée en faveur
              
              
              du Gouvernement et de la conduite qu’il a tenue dans la dernière
              
              
              circonstance. Dans presque tous les théâtres, les airs patriotiques
              
              
              ont été joués, chantés et accueillis par des
              
              
              applaudissements. Partout la tranquillité a paru régner et
              
              
              même la joie a paru renaître... 
             Bourse. - L’affluence a été beaucoup plus considérable
              
              
              aujourd’hui à la bourse ; on trouvait facilement à placer les
              
              
              rentes dont le cours a été fortement en baisse, et, selon le
              
              
              bruit général, elle n’a d’autre motif que la proposition qui,
              
              
              dit-on, a été faite au Conseil de les convertir en effet au
              
              
              porteur. Les cours de cet effet ont été 12 livres 10 sols,
              
              
              15 livres et 11 livres 5 sols. Les bons du ¼ se sont faits à
              
              
              53 0/0 de perte. Ceux des ¾ de 10 livres 15 sols à 9 livres 7
              
              
              sols 6 deniers. 
             COUSIN. 
          
          Livre des sources médiévales: [xyxy]: text sources from the now defunct Arisitum website. Contact Paul Halsall, halsall@murray.fordham.edu if any text is here improperly.